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L'Anarque. Mes notes de lecture.

L'Anarque

Décembre 2015-Au bout du rouleau.-Georges Simenon.-

Un couple en cavale s’arrête à Chantournais, une petite ville de province et prend une chambre à l’Hôtel de l’Etoile. Quelques jours auparavant l’homme,Marcel Viau, avait repéré un gros homme au portefeuille bien rempli de billets dans un tripot de Montpellier. Il l’avait attendu à la sortie de l’établissement pour l’agresser et le dépouiller. Mais sa victime avait noté les numéros des billets et les a communiqués à la police. Sylvie sa compagne, rencontrée dans une boîte de nuit deToulouse où elle était entraneuse a rencontré par hasard Marcel au cours de sa cavale et a choisi de l’accompagner dans sa fuite. A Chantournais, Marcel joue au cartes et gagne de l’argent. Finalement la police finit par le repérer et l’arrête.

Tous les thèmes simenoniens sont regroupés dans ce roman de 123 pages dont on pressent le dénouement dès les premières lignes : la fuite, la sortie de route, le passage de la ligne, les relations de domination dans le couple, le déterminisme criminel.

Marcel Viau est une force de la nature, un homme qui ne s’en laisse pas compter et se bat quand il le faut. « Même parmi les types de l’infanterie coloniale, il avait rarement rencontré plus fort que lui ». Il a fait tous les métiers et a baroudé à travers le monde. Il boit beaucoup et l’alcool ne semble pas le diminuer mais lui fait oublier le risque et accroît son agressivité. Il est en marge. Il ne sera jamais comme les autres mais il ne le veut pas on plus. Qui sont les autres ? Ceux qui sont rangés. Les bourgeois. Ce n’est peu être même pas clair dans son esprit. « Et vous autres, vous êtes des larves, de vulgaires larves…Parcequ’il valait mieux qu’eux et qu’il en avait conscience. » Mais sa différence lui pèse, elle le force sans cesse à sortir de la route, à passer la ligne. « Il n’avait pas d’issue, parce qu’il n’avait pas le courage de continuer. Faire quoi ? Pourquoi ? Cela recommencerait toujours, après un temps plus ou moins long. Il y avait assez longtemps que cela durait et qu’il en était écoeuré. » Mais quels sont ces démons qui le tenaillent ? Le désir de commettre l’irréparable de sortir des normes, de violence ? Il envisage même de tuer Sylvie, sans raison, par simple attirance du caractère transgression de son acte. Il est au bout du rouleau.

Slyvie est raisonnable, posée, réfléchie. On se demande bien pourquoi elle a suivi Marcel. Est elle amoureuse de lui ? C’est probable car pourquoi supporter les humiliations, les violences qu’il lui fait subir si ce n’est par amour. Mais il y'a plus que cela. Il y a une dimension dominant dominée qui semble lui convenir et qu’elle parait accepter en toute lucidité. « Elle était trop intelligente pour ne pas savoir quel danger elle courait ». Les dialogues du couple sont éloquents à cet égard : «

-Tu sais ce que j’ai envie de faire ? (c’est Viau qui parle à Sylvie)

Elle ne bronche pas.

-De te casser la gueule.

-Si tu veux.

Elle savait qu’il en était capable et elle n’avait pas peur.

Etrange couple. L’amour charnel est pratiquement absent entre eux. Il est remplacé par cet affrontement permanent presque sensuel qui semble leur convenir à tous les deux.

Au bout du rouleau est un petit chef d’oeuvre en ce qu’il restitue ces atmosphères que Simenon seul sait décrire. Une petite ville de province. La relations hors norme de deux êtres. L’angoisse d’une fin qui s’annonce et que rien ne peut empêcher.

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